La tendance des derniers Upfronts 2016 semble se confirmer : les chaînes de télévision adoptent le programmatique sous l’effet de la convergence des achats vidéo et TV sur le marché américain.
De la vidéo à la télévision
La plupart des groupes audiovisuels commercialisent leurs inventaires vidéo de manière programmatique. Et l’ouverture au linéaire est étudiée de près, non seulement parce qu’il est stratégique d’anticiper les évolutions plutôt que de les subir, mais également parce qu’elle pourrait s’accompagner d’une revalorisation de certains espaces. Cependant, le risque de « marchandisation » (commoditization), de décontextualisation et l’exemple du display classique les incitent à la prudence et confirment leur volonté de garder la main sur la commercialisation de leurs espaces publicitaires.
C’est pourquoi le modèle de la place de marché privée sans real-time bidding fait florès. Ainsi, la régie du groupe NBC Universal a lancé en 2014 NBCUx pour ses inventaires display et vidéo. Et les inventaires linéaires vont y être intégrés, au sein de l’offre « NBCUx for Linear », à partir de la fin 2016, selon les annonces de Krishan Bathia, Executive Vice President Business Operations & Strategy du groupe : « notre objectif est de simplifier le processus de planification et de transaction de la télévision linéaire pour nous rendre plus efficaces ». Cette offre permettra aux agences d’automatiser leurs achats, intègrera plus de qualification de l’ensemble des inventaires du portefeuille de chaînes broadcast et câble du network américain et leur donnera également la possibilité d’utiliser des data tierces (1st party ou 3rd party). Cette intégration des espaces premium serait une première. Car pour l’instant, les expérimentations ont plutôt concerné des invendus.
Ce mouvement d’ouverture de la télévision au programmatique se fonde en grande partie sur l’automatisation garantie de l’ensemble des process d’achat (automated guaranteed deals) initiée fortement par les régies des groupes audiovisuels. Dans ces transactions, les prix sont fixés à l’avance – pas d’enchères, pas de temps réel – et les relations entre agences et régies restent fortes. Une approche largement favorisée par ces dernières, car ces deals sont passés sur une période longue (environ 6 mois), contrairement aux micro-transactions non planifiées du RTB, et sont également ouverts aux autres actifs digitaux des groupes audiovisuels, permettant la mise en place de campagnes multi-écrans. Ce point intéresse les agences, en demande de globalisation et d’accès à l’ensemble des inventaires afin de pouvoir mesurer les performances des campagnes. De plus, des outils technologiques de gestion des deals automatisés garantis ont également été développés par les intermédiaires, tels Google DoubleClick, sans surcoût d’intermédiation, et renforcent l’appétence des acteurs de la chaîne publicitaire TV et favorise le développement d’expérimentations. Progressivement l’achat des inventaires vidéo et TV convergent.
Phénomène de double convergence
Cette convergence prend encore plus de valeur à l’aune des mouvements de rapprochement stratégiques en cours entre l’industrie des contenus et celle des télécoms. L’annonce du rachat de Time Warner Inc. par At&T en est l’une des dernières preuves. Car cette opération pourrait également avoir des impacts sur la commercialisation des nombreux actifs TV du groupe Time Warner : HBO, The CW et les chaînes de l’entité Turner Broadcasting System Inc. composé de chaînes d’infos (CNN…), généralistes (TNT, TCM…), jeunesse (Boomerang…) et sportive (NBA TV). Or, AT&T structure une offre programmatique autour de sa place de marché privée, « Video Inventory Platform », développée en partenariat avec Videology. Présenté en mars dernier et en test pendant plusieurs mois, cet AdEx permettrait aux annonceurs d’acheter en self-service via une interface web et en faisant appel à des données de ciblage des spots sur l’ensemble des inventaires vidéo et linéaires diffusés dans les 26 millions de foyers américains abonnés à une offre TV de l’opérateur telco, soit le service triple-play ou DirecTV (leader de la télévision par satellite entré dans son giron en juillet 2015 pour 49Mds$). Pour rappel, DirecTV a développé le service de publicité addressable auprès de 14 millions de foyers, parc le plus étendu du marché US. Cette place de marché pourrait intégrer les inventaires des nouvelles chaînes distribuées par l’opérateur et représenter l’offre programmatique la plus développée en termes de programmatique TV, fondé sur l’automatisation et le ciblage.