Le constat n’est pas nouveau et certainement exagéré. Mais, au moment où les studios américains sont en train de redéfinir leurs stratégies pour sauver le marché du Home Entertainment à base de Blu-ray 4K ou de Premium VOD, les annonces des principaux constructeurs de téléviseurs à l’IFA de Berlin cette semaine montrent que les grandes marques de l’électronique grand public se préparent à accompagner le retour en grâce sinon en majesté du principal écran du foyer.
Si on laisse à part l’annonce à la limite de la provocation du japonais Sharp qui se prépare à commercialiser des téléviseurs 8K au printemps prochain afin de coller à la diffusion des JO 2020 par la NHK, et ce alors que le marché commence juste à constater avec soulagement le véritable décollage des ventes de matériels UHD 4K, les annonces de l’IFA 2017 se concentrent sur la maturité des technologies et leur combinaison. Dans un seul but, celui d’apporter dans le salon une qualité d’expérience visuelle et désormais sonore à la hauteur des attentes. Celles du grand public certainement, mais également celles des industries de contenus, qui, des studios aux nouveaux acteurs du web attendent la meilleure mise en valeur possible pour leurs productions. Concrètement, trois éléments dominent les annonces. L’installation de nouveaux standards toujours plus élevés sur le très haut de gamme, vitrine de l’industrie ; la place accordée à la qualité du son ; la multiplication des partenariats avec les acteurs des contenus.
Des dalles OLED de 77 pouces s’installent sur le très haut de gamme
La présentation des derniers modèles des constructeurs japonais Sony et Panasonic montre que les dalles de 77 pouces en technologie Oled s’installent désormais au sommet de leurs gammes respectives. Les deux japonais partagent la même dalle construite par LG Display qui propose lui aussi des modèles Oled 77’ avec LG Oled 77G7V et LG Oled 77W7V annoncés avant l’IFA. Pour leurs concurrents chinois Philips (TPV) et TCL, les modèles Oled s’arrêtent pour l’instant à 65’ et il faut rebasculer sur une technologie de rétroéclairage LCD pour atteindre 77’. Si les deux nouveaux modèles japonais très impressionnants restent pour l’instant financièrement inaccessibles avec des prix proches des 20 000 euros, ils définissent néanmoins un nouvel horizon pour les téléviseurs d’exception.
Du côté de Panasonic, le TX‑77EZ1000 bénéficie bien sûr des meilleures technologies du groupe avec une dalle LG 4K couplée avec la technologie maison Master HDR OLED qui permet grâce au filtre Absolute Black d’obtenir des noirs profonds. Le téléviseur utilise le processeur Studio Colour HCX2 avec des tables de conversion 3D LUT professionnelles pour la colorimétrie. Le modèle est certifié Ultra HD Premium, le label de l’Ultra HD Alliance prenant en compte le traitement des couleurs (espace colorimétrique étendu REC.2020), le support du HDR, les taux de contraste ainsi qu’une meilleure immersion audio. EZ1000 bénéficie ainsi d’une barre sonore qui comprend 14 éléments différents dont huit caissons de graves et quatre caissons de basses.
Le Sony Bravia KD-77A1 déjà présent au CES, rentre officiellement au catalogue du japonais. Il reprend pour l’essentiel les caractéristiques des autres téléviseurs Oled Bravia A1 mais avec là encore une dalle Oled 10 bits de 77 pouces Ultra HD fabriquée par LG Display. Le traitement de l’image, principal point fort de Sony repose sur le processeur Sony X1 4K Extreme qui réduit le bruit numérique et améliore les dégradés de couleur (Super-bit Mapping 4K HDR). Pour le système d’exploitation, Sony fait confiance à la dernière version d’Android TV (7.0 nougat) proposant la fonctionnalité Google Cast et surtout la commande vocale. Le partenariat avec Google va d’ailleurs au-delà du logiciel puisque les acheteurs de la gamme Bravia 2017 bénéficient de trois mois d’abonnement gratuit à Google Play Music ainsi que de l’achat définitif d’un des titres 4K Ultra HD du magasin Google Play Films. Enfin, comme dans le cas de Panasonic, le téléviseur se caractérise par un système audio particulièrement performant, Acoustic Surface, qui propose deux enceintes derrière la dalle en verre et qui la font vibrer afin de produire du son permettant une unification « parfaite » entre le son et l’image.
Des partenariats de plus en plus poussés avec l’industrie du cinéma
Le Panasonic 77EZ1000 intègre comme on l’a vu le nouveau processeur d’image, Studio Colour HCX2 (« Hollywood Cinema Experience 2 ») pour lequel la société japonaise a collaboré directement avec des coloristes de Hollywood, spécialistes de la post-production dans les studios spécialisés Company 3, EFILM et Encore. Ces trois sociétés ont ainsi homologué le téléviseur et l’utilisent comme écran de référence client pour les sessions de réglages couleur des longs-métrages et des séries. Sony de son côté mise sur la compatibilité de ses téléviseurs avec le Dolby Vision, une technologie HDR développée par les laboratoires Dolby qui garantit un contrôle rigoureux depuis l’étalonnage du master en post-production jusqu’au visionnage, apportant ainsi la caution que l’image finale est conforme à l’originale voulue par le réalisateur.
Ce type de partenariats autour de technologies issues ou utilisées dans l’industrie cinématographique est une des principales tendances pour les constructeurs qui cherchent à proposer un rendu de plus en plus proche de celui du cinéma.
Les deux leaders du marché, les sud-coréens Samsung et LG, ne sont pas en reste face à leurs concurrents japonais. Samsung a ainsi profité de l’IFA pour présenter le nouveau standard HDR10+, défini conjointement avec Panasonic et le studio 20th Century Fox. Ce standard vise à faire évoluer le HDR10 qui domine le marché depuis les premiers téléviseurs 4K HDR en 2015. Technologiquement, le HDR10+ repose sur un mécanisme capable de gérer les métadonnées HDR de manière dynamique et donc de prendre en compte les spécificités de chaque téléviseur comme le type de rétroéclairage (LED, OLED, QLED), la puissance lumineuse et la colorimétrie, pour optimiser l’image en temps réel. HDR10+ est un format ouvert et libre de droits, et Samsung, Panasonic et 20th Century Fox doivent créer une entité commune pour distribuer les licences auprès des acteurs de l’écosystème (producteurs de contenus, fabricants de matériels). Concernant l’offre de contenus, Amazon Vidéo a annoncé que des premiers contenus encodés en HDR10+ seraient disponibles sur sa plateforme à la fin de l’année.
LG pour sa part annonce que les TV OLED de la gamme 2017 bénéficieront d’un mode de réglage Technicolor Expert qui permet une optimisation au niveau du rendu des couleurs. Les deux groupes, réunis au sein de l’UHD Alliance collaborent étroitement depuis 2016 pour rapprocher les technologies OLED 4K HDR avec les standards d’Hollywood. Les premiers éléments de la collaboration avaient été dévoilés au CES 2016 ou les deux entreprises avaient montré des contenus inédits de Francis Ford Coppola étalonnés en HDR. La collaboration prend donc encore un peu plus d’ampleur et à l’image du concurrent Samsung, positionne LG comme un partenaire des sites de postproduction de Technicolor. Dans les deux cas on assiste finalement à un rapprochement important entre les écrans professionnels utilisés par l’industrie pour créer, visionner et approuver les contenus avant leur distribution et les écrans destinés au grand public.
Les organisateurs de l’IFA attendent une année faste pour les fabricants de téléviseurs, avançant le fait que les technologies OLED et Ultra Haute-définition deviennent financièrement accessibles. Si l’ultra haute-définition s’impose en effet comme un nouveau standard pour le grand public avec des entrées de gamme dont les prix ont fondu, les modèles les plus alléchants des fabricants, ceux capables de tendre vers une qualité toujours plus proche de l’expérience de la salle de cinéma, sont malheureusement hors d’atteinte pour le commun des mortels. Reste que le marché de l’EGP a prouvé à maintes reprises la rapidité de la diffusion et de la démocratisation technologique, qui doit in fine permettre de faire de remonter le prix moyen d’achat d’un téléviseur qui ne se situe en Europe qu’à 400€.